Le poème / depuis si longtemps / cherche son lecteur. / Alors / il tombe à genoux / à l’ombre / des plus grandes ailes / dans la nuit la plus profonde / avec les bancs déserts des jardins / et les crochets de fer dans les arbres. _ Yannis Ritsos

Pauvre que j’étais / J’allais ainsi dans mes pensées / À la rencontre d’une absence / Tandis qu’à l’horizon soulevés par la brume / De grands arbres à mi-voix parlaient aux saisons _ Georges Schehadé

Trop de tendresse au front des feuilles / comme une épée consumée, / trop de faux pour chaque image / de notre vie déjà pillée. /…/ L’Arbre interdit nourrit notre amour / de ses racines d’agonie _ Jean Cayrol

Le mystère des choses, où donc est-il ? / Où donc est-il, qu’il n’apparaisse point / pour nous montrer à tout le moins qu’il est mystère ? / Qu’en sait le fleuve et qu’en sait l’arbre ? Et moi, qui ne suis pas plus qu’eux, qu’en sais-je ? / Toutes les fois que je regarde les choses et que je pense à ce que les hommes pensent d’elles, / je ris comme un ruisseau qui bruit avec fraîcheur sur une pierre. _ Fernando Pessoa

J’ai sauté. / L’arbre a tenu. / Branches éclaboussées / de sang vert cru. _ Hugo Claus

Celui qui attend est comme un arbre avec ses deux oiseaux, solitude et silence. Il ne commande pas à son attente . Il bouge au gré du vent, docile à ce qui s’approche, souriant à ce qui s’éloigne. /…/ Celui qui attend, nous l’appelons le « tout comblé » — car dans l’attente le commencement est comme la fin, la fleur est comme le fruit, le temps comme l’éternel. _ Christian Bobin

« Honneur au Prince sous son nom ! La condition de l’homme est obscure. Et quelques-uns témoignent d’excellence. Aux soirs de grande sécheresse sur la terre, j’ai entendu parler de toi de ce côté du monde, et la louange n’était point maigre. Ton nom fait l’ombre d’un grand arbre. _ Saint-John Perse

Lorsque viendra le printemps, / si je suis déjà mort, / les fleurs fleuriront de la même manière / et les arbres ne seront pas moins verts qu’au printemps passé. / La réalité n’a pas besoin de moi. _ Fernando Pessoa

Ferme les yeux visage noir / Ferme les jardins de la rue / L’intelligence et la hardiesse / L’ennui et la tranquillité / Ces tristes soirs à tout moment / Le verre et la porte vitrée / Confortable et sensible / Légère et l’arbre à fruits / L’arbre à fleurs l’arbre à fruits / Fuient. _ Paul Éluard

Les dieux de la terre et des mers / Par la nature le cherchèrent, / Mais leur quête fut toute en vain : / L’arbre n’est qu’en l’esprit humain. _ William Blake

Quand la violence eut renouvelé le lit des hommes sur la terre, / Un très vieil arbre, à sec de feuilles, reprit le fil de ses maximes… / Et un autre arbre de haut rang montait déjà des grandes Indes souterraines, / Avec sa feuille magnétique et son chargement de fruits nouveaux. _ Saint-John Perse

Nous venions, souvenez-vous-en, arbres, / D’un pays de glaces et de neiges / Et le plus bel arbre, avec ses bourgeons et ses feuilles / Y dort dans un linceul transparent / Sur un lit moelleux de feuilles des lointains automnes. _ Robert Desnos

Voici que je crie après Toi, / voici je trouble Ton sommeil, / combien de temps l’écorce seule / aura-t-elle pitié de l’arbre ? _ Benjamin Fondane

Dans le bocage de mes os, / Dans l’arbre bleu de mes artères, / Mêlez-vous, fleurs, poissons, oiseaux, / Si mal réunis sur la terre. _ Jean Cocteau

Un homme atteint de telle solitude, qu’il aille et qu’il suspende aux sanctuaires le masque et le bâton de commandement ! / Moi je portais l’éponge et le fiel aux blessures d’un vieil arbre chargé des chaînes de la terre. / “ J’avais, j’avais ce goût de vivre loin des hommes, et voici que les Pluies…“ _ Saint-John Perse

C’était lors de mon premier arbre, / J’avais beau le sentir en moi / Il me surprit par tant de branches, / Il était arbre mille fois. / Moi qui suis tout ce que je forme / Je ne me savais pas feuillu, / Voilà que je donnais de l’ombre / Et j’avais des oiseaux dessus. _ Jules Supervielle

SOLEILS-FILAMENTS / au-dessus du désert gris-noir. / Une pensée haute comme / un arbre / accroche le son de lumière : il y a / encore des chants à chanter au-delà / des hommes. _ Paul Celan

Nul geste d’amitié chez l’oiseau, le nuage, / le toit grégaire dont se froncent les sourcils. / Un moine vert et muet habite dans chaque arbre / et un ciel sans pupilles regarde le monde. _ Jorge Carrera Andrade

Il ne suffit pas d’ouvrir la fenêtre / pour voir les champs et la rivière. / Il ne suffit pas de n’être pas aveugle / pour voir les arbres et les fleurs. / Il faut également n’avoir aucune philosophie. / Avec la philosophie il n’y a pas d’arbres : il n’y a que des idées. _ Fernando Pessoa

Parfois Dieu déforme l’homme dans son sommeil : / l’œil est immense sur le front comme une coupole transparente, / son corps grandit comme un arbre prodigieux, des ailes battent sur son dos / mais le matin toute la terre semble un lit d’herbes dérangées. _ Jean Cayrol

Tremblants s’égarent à présent les doigts, / la mer est loin, très lentement la voix se brise, / pour mourir c’est presque déjà trop tard. /…/ N’en doute pas : j’ai été cet arbre , / cette joie promise aux seuls oiseaux. _ Eugénio de Andrade

Mon cœur est l’arc et le ciel est la corde / d’où s’envola comme un rire la flèche / la flèche oiseau qui s’est rivée au cœur / au cœur de l’arbre enchevêtré d’oiseaux _ Michel Leiris

Parle. / Dis quelque chose, n’importe quoi. / Mais ne reste pas là comme une absence en acier. / Choisis ne serait-ce qu’un mot, / qui te liera plus étroitement / à l’indéfini. / Dis : / “en vain“, / “arbre“, / “nu“. / Dis : / “on verra“, / “impondérable“, / “poids“. / Il y a tant de mots qui rêvent / d’une vie brève, sans liens, avec ta voix. _ Kiki Dimoula

Moi, dans l’arbre d’orties avec l’insecte de bois, / Dans le lit de verre de la vigne avec l’escargot et la fleur, / J’écoute le mauvais temps tomber. _ Dylan Thomas

Le cœur de mon soleil / Le chant du coq le crève / Mais jamais le sommeil / N’ose y verser ses rêves. /…/ Séchant selon mes vœux / Je fixe le silence / Quand des oiseaux de feu / De mon arbre s’élancent. _ Jean Genet

L’arbre se meurt / avec les oiseaux de l’oubli _ Jean Cayrol

Elle court, elle court, l’aurore / dans les yeux secrets des morts / Tant d’abeilles affamées tournent autour d’arbres si nus / et tant de dieux écumants sortent des mondes perdus. _ Jean Cayrol

J’ouvre les yeux : / beaucoup d’arbres sont nés / cette nuit. _ Octavio Paz

Loin de l’endroit où tant de rêves meurent / La mémoire entasse des heures / Au bord de l’eau / Les arbres pleurent / La montagne roule son dos / En haut une tête se penche / La face que l’on voit est blanche _ Pierre Reverdy

Si le monde était un gâteau/ La mer de l’encre noire/ Et tous les arbres des lampadaires/ Qu’est-ce qui nous resterait à boire _ Philippe Soupault

Un jour j’abandonnerai ces mains/ dans l’argile encore chaude du silence,/ je gravirai le ciel,/ aux arbres de telles choses sont consenties. _ Eugénio de Andrade

still life N° 38

composition / 51

Ce qu’on entend lorsqu’on frappe la vacuité, c’est un son profond et continu, qui résonne avant et après le coup de marteau. _ Dogen zenji

_ L’on ne peut sortir de l’arbre par les moyens de l’arbre. _ Francis Ponge